FMI : un jour, on y va ; un jour on n’y va pas

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FMI

La contradiction totale au sein de l’appareil exécutif tunisien. D’un côté, on a un président qui refuse le crédit de base au FMI, et de l’autre, on a un gouvernement, une banque centrale et une diplomatie qui font tout pour l’obtenir. Paris et Rome regardent avec anxiété ce qui se passe et tentent par tous les moyens de « sauver » la Tunisie de l’effondrement.

Le président tunisien Kais Saied a exprimé, jeudi 6 avril 2023, face aux médias, son opposition aux « instructions de l’étranger et à l’appauvrissement des Tunisiens ». Il a souligné que la Tunisie « est capable de sortir seule de la crise (…) Le monde et les entités financières, comme le Fonds monétaire international (FMI), doivent comprendre qu’une personne n’est pas qu’un numéro… « . Ces déclarations interviennent dans le sillage d’une interrogation sur le crédit que la Tunisie entend souscrire au Fonds monétaire international.

Des mots étonnants quand on apprend que le gouvernement, qu’il a lui-même nommé, travaille depuis plus d’un an pour obtenir ce crédit de 1,9 milliard de dollars pour compenser l’énorme manque à gagner budgétaire. Encore plus surprenant quand on sait que le crédit est clairement inscrit dans la loi de finances 2023 signée par le président.

Immédiatement après l’annonce, les partisans du président ont salué ces déclarations qui rejettent les diktats des puissances étrangères. Depuis plus d’une semaine, nous avons traité les déclarations les plus folles et les analyses les plus farfelues comme, par exemple, la future adhésion de la Tunisie au groupe des BRICS ou la nécessité pour le Fonds monétaire international de revoir ses revendications à la baisse et de cesser d’exiger des conditions qui appauvrissent le « grand peuple tunisien ».

On dit que les masses tunisiennes ont dit non au Fonds monétaire international et régleront elles-mêmes leurs problèmes ? Loin de là, car la Tunisie n’a, en fait, présenté aucune demande d’annulation de la procédure en cours, comme l’a confirmé Jihad Azour, directeur du département Moyen-Orient et Asie centrale du Fonds monétaire international, lors d’une conférence de presse tenue jeudi avril 13e.

Un peu plus tôt, il avait rencontré Samir Said, ministre de l’Economie, et Marwan El Abbasi, gouverneur de la Banque centrale de Tunisie, partis à Washington pour les Spring Meetings.

Pendant ce temps, en Europe, l’Italie et la France continuent d’œuvrer pour que la Tunisie obtienne ses prêts.

La porte-parole du ministère français des Affaires étrangères, Anne-Claire Legendre, a confirmé lors d’un point presse jeudi 13 avril 2023, que la finalisation de l’accord entre la Tunisie et le Fonds monétaire international est « une priorité pour la France ».

Le ministre italien des Affaires étrangères, Antonio Tajani, a déclaré, lors d’une conférence de presse tenue le même jour à Rome, que son pays souhaitait que le Fonds monétaire international commence à financer la Tunisie sans poser de conditions. Il était accompagné de son homologue tunisien, Nabil Ammar, qui lui a assuré que les réformes se poursuivraient. Étrange propos du ministre tunisien, et on sait qu’il n’y a pas encore de réformes. Il n’y a pas eu d’augmentation des prix du carburant en 2023, comme prévu dans la loi de finances, et le décret modifiant la loi 9-1989 relative à la restructuration des établissements publics n’a pas été publié au Journal officiel, bien qu’il ait été discuté en Conseil des ministres. depuis le 10 février.

Il est difficile d’expliquer cette dichotomie entre les paroles du président et les actions de ses ministres en Tunisie. Que doit-on comprendre ? Allons-nous ou pas ?

Au-delà des messages farfelus des partisans du président sur Facebook, des analystes sains d’esprit et des partisans réputés du président tentent d’expliquer. La Tunisie va désormais se tourner vers la Chine, dont l’amitié avec la Tunisie est ancestrale et légendaire, affirme Fatma Karray, célèbre journaliste et chroniqueuse radio. Au contraire, la célèbre avocate et chroniqueuse Maya Kasuri explique que le président n’a jamais dit non au FMI, mais rejette plutôt des conditions dures qui pourraient appauvrir le peuple. Comprenez qui peut.

La question est restée sans réponse jusqu’à ce que le président ait de nouveau surpris tout le monde jeudi soir 13 avril, soit après les déclarations du ministre italien, du responsable français et du directeur du Fonds monétaire international. Kais Saied, lors de sa rencontre avec son premier ministre, a répété il y a une semaine ses propos selon lesquels « les êtres humains ne sont pas de simples unités arithmétiques et/ou des nombres et que tout équilibre doit être basé sur la garantie des droits des citoyens et le maintien de la paix sociale ».